Comment YUX Dakar crée la première communauté UX du Sénégal (et d’Afrique de l’ouest !)
Nous sommes samedi. Réuni dans un bureau de Dakar, une dizaine de graphistes et designers s’est donné rendez-vous pour un événement un peu particulier : un “iconathon”. Contraction de “icône” et de “hackathon”, l’atelier de design vise à créer des visuels qui représentent vraiment la société africaine. L’atelier est organisé par YUX Dakar, le lab sénégalais spécialisé en expérience utilisateur.
Et si le terme “d’expérience utilisateur” vous est inconnu, ne vous inquiétez pas ! Daniel Locko et Yann Le Beux, deux des co-fondateurs, nous expliquent leur activité avec une infinie pédagogie…
Nous utilisons le design thinking pour créer des produits digitaux adaptés à l'Afrique.
C’est un véritable lab d’innovation que l’équipe de YUX Dakar est en train de créer, en rassemblant toute une communauté de professionnels autour de l’UX et du Design. Leur objectif ? Permettre aux entreprises de proposer des produits et services mieux adaptés aux populations et à leur diversité.
MIEUX CONNAÎTRE L’EXPÉRIENCE UTILISATEUR (UX) EN AFRIQUE
Derrière ces deux lettres énigmatiques (UX pour “User eXperience”) se cache un concept que nous expérimentons tous au quotidien. Apparu dans les années 2000, la notion “d’expérience utilisateur” désigne en effet la manière dont nous allons vivre l’utilisation d’un produit ou d’un service. L’objectif de l’UX, c’est donc d’améliorer notre satisfaction en tant qu’utilisateur.
Daniel : “L’expérience utilisateur, c’est le ressenti que l’humain, ou “l’utilisateur”, aura quand il sera en interaction avec une solution. L’UX, c’est donc analyser le ressenti de l’être humain par rapport à ces interactions, actuelles ou futures.”
Alors que le domaine est bien connu en Europe et en Amérique du Nord, l’UX est encore très peu enseigné et documenté en Afrique. Ce manque de connaissance est extrêmement défavorable aux entreprises locales, qui font difficilement le poids face à la concurrence internationale.
Le risque étant de voir apparaître sur le marché des produits et services inadaptés aux utilisateurs finaux, parfois illettrés ou habitant en zone rurale peu connectée.
Yann : “En Occident, les professionnels de l’UX ressentent moins le besoin de faire des études. Il y a déjà pas mal de profils utilisateurs connus et de données analysées. En revanche ici, au Sénégal, on n’a aucune idée de comment la plupart des gens utilisent l’outil numérique ou aimeraient l’utiliser. On a donc d’abord besoin de comprendre les usages.”
CRÉER UNE COMMUNAUTÉ UX POUR FORMER, ÉTUDIER ET ACCOMPAGNER
Pour insuffler cette dynamique et développer la connaissance autour de l’expérience utilisateur, YUX Dakar a commencé par organiser des ateliers de formation. Destinés aux graphistes, développeurs et entrepreneurs, ces ateliers transmettent les méthodologies et les outils de l’UX-UI design.
Yann : “On a commencé par organiser des formations. Puis on a travaillé sur une série de meet-up pour partager nos études et nos méthodologies, afin de favoriser la collaboration entre développeurs et designers.
Dernièrement, on a eu besoin d’icônes africaines pour l’un de nos projets. On a alors proposé à la communauté de créer de nouvelles icônes et on a lancé les “iconathons”. En plus d’animer la communauté, ce type d’événement nous permet de repérer des talents.”
Toujours dans l’optique d’adapter au mieux les produits et services aux spécificités locales, YUX Dakar réalise également des études ethnographiques et sociologiques. Les données qui résultent de ces études sont essentielles, notamment pour mieux comprendre les interactions homme-machine en Afrique.
Daniel : “L’étude nous permet de mieux comprendre les problématiques, pour mieux orienter notre créativité par la suite. Grâce à nos méthodes de créativité, nous aboutissons à des concepts essentiels pour une entreprise. “
Récemment, l’équipe a ainsi mené une étude qualitative sur les marchands ambulants au Sénégal et leur rapport au numérique. Alors que ce groupe d’acteurs représentent tout un pan de l’économie informelle du pays, ils sont très peu, voire pas du tout, étudiés.
Yann : “Nos designers ont passé plusieurs journées au contact des marchands afin de comprendre leurs usages technologiques, leurs frustrations et leurs aspirations. L’objectif de cette étude rendue publique est de permettre la conception de solutions numériques utiles et adaptés à leur quotidien.”
A partir de leurs études, l’équipe de YUX Dakar conçoit des applications digitales répondant aux problématiques identifiées. Car c’est bien là que se trouve tout l’intérêt de la méthodologie UX : permettre de concevoir des produits numériques mieux adaptés aux publics africains.
COMMENT YUX DAKAR EST-IL NÉ ?
Daniel : “J’ai rencontré Camille Kramer (co-fondatrice de YUX Dakar) lors d’un événement organisé par l’entreprise Microcred, où je travaillais. Suite à notre rencontre, on s’est dit qu’il y avait vraiment quelque chose à faire dans le design. Les développeurs avaient leur propre communauté et ça bougeait pas mal. Mais rien côté design. On a donc commencé à monter une communauté avec d’autres designers.”
Yann : “On a tous des profils différents. Pour ma part, je travaillais dans l’incubateur CTIC Dakar et j’avais pas mal de projets en tête, dont une école de développeurs. En rencontrant la plupart des entreprises intéressées par une école de développement, le besoin qui ressortait le plus souvent, c’était le design. C’est au même moment que Daniel et Camille ont commencé à former des designers. On s’est retrouvés et après quelques verres, on a commencé à monter un 1er planning de formation. Tout est parti de là.”
Suivez l’actualité de la communauté YUX Dakar via la page facebook : @yuxdakar et sur le blog : yuxdakar.com.
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